“L’éthique est une discipline philosophique portant sur les jugements moraux et dont le concept est tout proche de celui de la morale. L’éthique représente une notion d’importance pour le secteur associatif. Explications.”

Découvrez l’article “Importance de l’éthique dans le secteur associatif ” de Pierre Marcenac, Administrateur et trésorier de l’Institut IDEAS et Yves d’Hérouville, Président de l’Institut des dirigeants d’associations et fondations (IDAF).

Initialement paru dans le dossier “Ethique et transparence” de JurisAssociations n°672 (février 2023).

L’éthique est une réflexion fondamentale de tout peuple afin d’établir ses normes, ses limites et ses devoirs. C’est en effet ainsi que la définit André Comte-Sponville : « morale » et « éthique », dans le langage courant, sont parfaitement synonymes.

Qu’est-ce que l’éthique ?

« L’étymologie le confirme. Ethos, en grec, comme mos ou mores en latin, signifiait les mœurs, le caractère, les façons de vivre et d’agir. Aussi, les deux mots d’éthikos et moralis étaient-ils, dans l’Antiquité, la pure et simple traduction l’un de l’autre selon qu’on passait du grec au latin ou du latin au grec. Cela n’empêche pas, à titre individuel, de distinguer deux concepts philosophiques différents. Pour ma part, j’entends par “morale” ce qui relève du bien et du mal, considérés comme valeurs absolues ou inconditionnelles : c’est l’ensemble de nos devoirs et de nos interdits. Et j’entends par “éthique” ce qui relève du bon et du mauvais pour nous, donc considérés comme valeurs relatives. » (A. Comte-Sponville, « Morale, éthique, déontologie : de quoi parlons-nous ? », Économie et management no 158, janv. 2016.)

On associe souvent éthique et déontologie à tort. Selon le dictionnaire Larousse, « déontologie » vient du grec deon, -ontos (« ce qu’il faut faire ») et logie (« discours ») : c’est le propos moral des devoirs à remplir. On parle donc de déontologie pour rappeler les règles et les devoirs régissant une profession ou une activité réglementée : il en est ainsi du code de déontologie des médecins, des avocats, des experts-comptables, des magistrats, des notables, des huissiers de justice ou encore des sportifs.

Qui est concerné ?

L’éthique devient de plus en plus un sujet de préoccupation dans la vie de toute association. Un incident, voire un « accident éthique », peut ébranler sa réputation. Le non-respect de règles éthiques est un facteur de risque important, tant juridique que financier qu’en termes d’image. L’éthique fait également l’objet d’une attention accrue de la part du public, des donateurs, des médias..

Élus (administrateurs)

La prévention des conflits d’intérêts constitue un enjeu essentiel pour conforter la confiance des donateurs dans les associations.
Le conflit d’intérêts est une situation de fait dans laquelle se trouve placée une personne face à deux intérêts divergents, un intérêt général et un intérêt particulier (intérêt privé), qui pourraient exercer une influence sur son objectivité dans l’exercice de sa fonction et devant lesquels elle a un choix à faire. L’administrateur en poste ou comme candidat doit s’interroger sur la probabilité d’être placé dans cette situation de conflit d’intérêts. Il se doit d’être transparent envers le conseil ou le comité (nomination ou sélection) en établissant une « déclaration relative à la prévention des conflits d’intérêts ».

Salariés, bénévoles

S’agissant des salariés, et au-delà de leur contrat de travail, charte éthique, code de conduite et règlement intérieur (harcèlement moral, harcèlement sexuel, lutte contre les discriminations, relations entre collaborateurs, droit de la personne, protection de la réputation et du patrimoine de l’association, relations avec les tiers, respect de la vie privée, respect de la législation) doivent se combiner. Tous les salariés et bénévoles doivent se conformer aux valeurs et aux principes des règles éthiques dans toutes leurs relations, aussi bien avec les donateurs qu’avec les fournisseurs et les prestataires.

Relations avec les partenaires

La relation avec « le secteur privé » nécessite de s’assurer que celui-ci, les entreprises le plus souvent, est prêt à collaborer en respectant les valeurs de l’association.

Il convient de prendre l’exemple de l’association Handicap International. Tout d’abord, elle refuse, « sur la base de considérations d’ordre éthique, de s’associer avec les entreprises dont les secteurs d’activité sont contraires à ses valeurs et sa mission sociale. Cela inclut la production ou le commerce d’armes, d’alcool ou de tabac, ainsi que toute entreprise qui investirait dans la production de mines antipersonnel et de bombes à sous-munitions ».

Ensuite, elle vérifie les indicateurs éthiques suivants :
> violation des droits de l’homme et des droits fondamentaux du travail ;
> contribution active à un conflit ;
> pratiques commerciales prédatrices ou illicites ;
> production et commercialisation de produits portant atteinte à la santé humaine ;
> dégradation de l’environnement ayant un impact sur la santé humaine ;
> implication en matière de responsabilité sociétale et environnementale.

Élaborer une charte éthique

Pour déterminer le cadre de l’éthique, il convient de se doter d’une charte ou d’un code. La charte définit par des écrits solennels tous les principes de l’éthique.

Une charte éthique est un ensemble d’informations émises par l’organisme à destination de ses membres, de ses salariés, de ses bénévoles et de toutes les parties prenantes. Elle permet, d’une part, de rappeler les règles égales et, d’autre part, d’intégrer d’autres règles spécifiques en prenant en compte la vision de l’association, les valeurs qu’elle souhaite promouvoir et les relations qu’elle veut développer. C’est pourquoi la charte doit être élaborée avec la participation d’élus, de salariés et de bénévoles.

En principe, la charte est :
> de portée générale : elle poursuit l’objectif de recherche de légitimité sociale, énonce des valeurs fondamentales, souligne les responsabilités des différents acteurs de l’association et celles de l’organisme lui-même envers ses différents partenaires et acteurs ;
> pragmatique, afin d’éviter des situations concrètes violant ses valeurs et de protéger la réputation de l’association ;
> publique, publiée et communiquée.

La charte ou le code éthique devrait comprendre la mission, un énoncé de valeurs partagées et hiérarchisées, les règles de comportements attendus ainsi que les mécanismes et mesures prévus pour faire respecter la mission, les valeurs et les règles du code. On trouverait ainsi notamment les sujets suivants :
> prévention et lutte contre la fraude et la corruption ;
> prévention et gestion des conflits d’intérêts ;
> politique environnementale ;
> gouvernance ;
> protection des données ;
> conduite envers les partenaires ;
> droit d’alerte.

Plus-value d’une Charte Éthique

La charte peut être un instrument de gestion. La charte éthique n’ayant pas de valeur juridique proprement dite, l’association peut cependant s’en prévaloir auprès de ses salariés et bénévoles ainsi que de ses partenaires.

La mise en œuvre d’un tel outil éthique est une plus-value dans les domaines suivants :
> sécurité juridique ;
> nouvelles technologies et innovations ;
> réputation sur Internet, image de marque et notoriété ;
> qualité.

Cette charte doit vivre, son contenu peut évoluer et un suivi régulier de son application doit être fait.
La charte éthique est un document indispensable pour les associations qui souhaitent se faire labelliser.
La loi du 1er juillet 1901, qui est très libérale, laisse aux associations la possibilité de se doter de « règles de jeu » entre toutes les parties prenantes (élus, salariés, bénévoles, donateurs, partenaires, secteur public) en établissant un code éthique.

Article paru initialement dans le dossier “Ethique et transparence”

de JurisAssociations n°672 (février 2023)

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