Loupe sur la couverture du Juris associations n'616

Tribune :  Yannick Blanc, président du Futuribles International, vice-président de la Fonda et membre du Comité Label IDEAS.

Article paru initialement dans le dossier spécial de Juris Associations n°616

Deux affaires qui ont agité récemment le monde des fondations posent une fois de plus la question de l’efficacité, voire de l’effectivité du contrôle exercé par l’État sur les organismes privés exerçant des missions d’intérêt général. Le Parlement en a profité pour plafonner l’exonération fiscale accordée aux grands donateurs mais pas encore pour se pencher sur des dispositions qui permettraient de garantir le respect effectif de l’intérêt général. Les 10 ans d’expérience d’IDEAS lui offrent désormais un exemple probant de « ce qui marche ».

Soucieux de favoriser la mobilisation de fonds privés pour le seconder dans ses missions mais inquiet de voir l’initiative lui échapper totalement, l’État a multiplié les statuts et les critères permettant d’accorder un label d’intérêt général. Mais, à l’exception du CER des organismes faisant appel public à la générosité, rendu quasiment illisible à force de raffinement, rien n’existe pour vérifier dans la durée le respect de ces critères. L’obligation de missionner un commissaire aux comptes est certes un premier pas en ce sens, mais ce n’est pas suffisant.

Ce qui motive aujourd’hui la demande de reconnaissance d’utilité publique (RUP) des associations et fondations, c’est la recherche d’un label de qualité afin de faciliter la collecte de dons. Or, si la RUP est jugée longue et difficile à obtenir en raison des critères exigés par l’administration, elle ne comporte, une fois obtenue, aucune procédure de vérification autre que l’envoi annuel des comptes à l’administration et leur publication sur le site Internet du Journal officiel. L’administration n’est pas en mesure de procéder à un contrôle de ces comptes et ne dispose en outre d’aucun référentiel opposable pour apprécier la validité effective de la RUP dans la durée. La RUP ne garantit donc en rien la qualité de la gouvernance, de la gestion et de l’efficacité des associations qui en bénéficient. C’est pour pallier cette insuffisance manifeste qu’ont été créés le Comité de la charte du don en confiance il y a 30 ans et l’Institut IDEAS il y a 10 ans. Mais là où le premier répondait directement à l’insuffisance de l’État par un dispositif de contrôle mutuel et bénévole, IDEAS a renouvelé et enrichit la démarche en combinant l’accompagnement bénévole des organisations pour une amélioration continue et l’octroi d’un label par un comité indépendant.

La validité de la démarche repose sur trois points forts :

  • la qualité d’une organisation ne dépend pas seulement de sa conformité à un système de critères mais de la dynamique permanente qui permet de maintenir la qualité en fonction de l’évolution des missions et de l’environnement de l’organisation. L’interprétation du référentiel s’adapte du reste à toutes les tailles et à tous les modèles économiques des organisations ;
  • le renouvellement triennal du label ne nécessite pas de procédure excessivement lourde puisqu’il s’inscrit dans la démarche d’amélioration continue ;
  • entre les deux démarches bénévoles, celles de l’accompagnement et du Comité Label IDEAS, intervient un tiers professionnel indépendant, le commissaire aux comptes, qui vérifie par audit la conformité au référentiel. Sur une centaine de dossiers, le label a été retiré ou suspendu quatre fois : le taux d’échec est donc faible mais la sanction est effective, la suspension laissant la porte ouverte à une reprise de la démarche d’amélioration.

L’idée selon laquelle l’État n’a pas le monopole de l’intérêt général n’est pas neuve ! Mais il faillit à sa mission s’il ne joue pas son rôle de tiers garant. Les enjeux d’intérêt général et les actions qui peuvent y répondre ne sont pas définissables une fois pour toutes. Pour garantir sans verrouiller, pas besoin de réinventer la roue : il suffit d’adapter aux organismes d’intérêt général le modèle de la certification industrielle déjà étendu à bien d’autres domaines. Un organisme public accrédite les organismes certificateurs. Son référentiel de certification est élaboré à partir des pratiques professionnelles et de l’état de l’art. Il reste à adapter ce modèle au monde des organismes sans but lucratif dont, comme à IDEAS, une partie essentielle des compétences s’exerce à titre bénévole. L’expérience d’IDEAS est à la disposition de tous ; il est temps d’en tirer le meilleur parti au service de l’intérêt général.

Article initialement paru dans Juris Associations n°616